Depuis les 31 mai, j’ai la grande chance d’être en résidence d’écriture en Petite Camargue, chez :
A La Laune, le ciel est bleu (pas la moindre menace d’inondation à l’horizon) et la nature est reine. Ce moment, je l’attends depuis quelques mois au moins. Tout simplement parce que je vais enfin avoir le temps de m’atteler à un projet de roman que j’ai en tête depuis plus d’un an et qui est assez différent des précédents. Et qu’ici, je suis dans les conditions « idéales » (oui, ça n’existe pas qu’en rêve) :
– j’ai 30 jours pour moi c’est-à-dire 696 heures d’écriture puisque, c’est bien connu, un roman se construit à chaque instant et même en dormant ;
– je suis en tête à tête avec mes carnets et mon ordi, avec les oiseaux qui sifflotent non-stop et le vent qui souffle souvent pour remuer mes idées ;
– j’ai une table avec une fenêtre qui donne sur les vignes et les chevaux, un paysage qui change toutes les secondes de façon si imperceptible ;
Je me mets donc au défi de survivre dans cet environnement solitaire (parfois, il est 16h30 quand je parle pour la première fois à quelqu’un) et de courir 5 km par jour tout en écrivant 2500 mots par jour (sauf le week-end qu’il faut bien réserver pour boire un peu de rosé). Je ne suis pas sportive, mais je sais qu’en ce qui concerne la course à pied, je peux y arriver. Pour les mots, ce sera plus compliqué : j’écris lentement et, cette année, chaque fois que je me suis fixée un objectif « quantitatif », je n’y suis jamais parvenue. Je m’accroche un peu à cette phrase de H. Murakami dans « Autoportrait de l’auteur en coureur de fond » :
« Pour poursuivre son activité, il faut conserver son rythme. Ce qui est particulièrement important pour des tâches de longue haleine. Une fois que vous tenez le bon rythme, tout va bien. »
Résultat : après 14 jours, j’ai couru 50 kilomètres et j’ai terminé mon cinquième chapitre – c’est bien, mais je suis loin d’avoir écrit le bon nombre de mots. C’est rassurant de se connaître à ce point 😉 Alors, je décide de voir les choses autrement : je veux avoir terminé le premier jet de ce roman pour les 25 juin, le jour de mes 35 ans ! Je m’organise comme je veux, mais je dois pondre (comme dit ma maman) encore 7 chapitres dans les deux prochaines semaines.
J’ai profité des premiers jours pour savourer le calme et me familiariser avec le lieu : il y a plein d’auteurs qui sont passés par ici, plein de romans qui ont été écrits à cette fameuse table (dont certains que j’ai lus) et qui flottent un peu dans l’air, je crois. Je me suis replongée dans mon projet et j’ai redécouvert par-ci par-là des premiers (petits) jets, des idées ou des remarques que je ne comprends parfois plus (!). J’ai mis de l’ordre dans ma tête, dans mes carnets et dans Scrivener, un super logiciel que j’utilise depuis peu. J’ai réalisé qu’il y a des petits « hic » dans la trame narrative que j’ai construite pas à pas et que j’ai un sacré talent pour me compliquer la vie (ou plutôt l’écriture). En m’y remettant, je me suis aussi aperçue que le roman que j’ai écrit juste avant de venir ici va furieusement m’aider à aborder celui-ci. La vie est bien faite, hein ?
Je m’y suis mise ensuite plus « sérieusement », même si le terme est bien mal choisi dans le cadre d’un projet d’écriture où il est surtout question de s’amuser et de partir à l’aventure sur des terrains méconnus. Et ça, parfois, ça me fait un peu peur (d’autant plus que j’écris une histoire de fantômes) autant que ça a le chic de me faire douter. D’un jour à l’autre, je peux me dire que je cartonne ou que je ne réussirai jamais à déposer sur le papier l’histoire que j’ai dans ma petite caboche. Heureusement, mon amoureux a débarqué quelques jours avec toute sa bienveillance : il m’a écoutée, lue et a formulé des remarques aussi constructives que motivantes. Si je m’en sors d’habitude sans trop de difficultés pour créer des personnages uniques et attachants, faire avancer l’action, c’est une autre paire de manches ! Ca tombe bien : je vais avoir l’occasion de travailler à ce niveau dès maintenant. Avec sa venue, j’ai recommencé à savoir quel jour de la semaine on est et je me suis autorisée quelques pauses pour me balader dans la région : Vauvert, Aigues-Mortes, Nîmes et la mer. J’avais presque oublié qu’elle était là, celle-là. Il faut être un peu folle passionnée pour rester enfermée des heures entières alors qu’elle n’est qu’à quelques kilomètres.
Laissez un commentaire